極意Gokui ou l’esprit du kata

Dans le langage martial, gokui est généralement traduit par essence, ce qui n’est pas très explicite dans la compréhension d’une technique. Immédiatement, on pensera à ce que l’on ne voit pas nécessairement, et trop souvent on associera cela à de l’ésotérisme. Une autre définition de ce mot se traduit par les secrets intimes d’un art ou d’une habileté. Et parfois, cela sera traduit par le cœur, par ce qui anime la technique.

Bon, voilà pour la théorie. Essayons maintenant de voir comment nous pouvons interpréter tout cela en situation réelle. Pour y parvenir, on va utiliser un kata de base, le kihon happo musodori. Cette technique est relativement facile à exécuter. Le problème est que l’on a tendance à la faire de manière robotisée sans chercher à voir plus loin les secrets intimes qu’elle peut chercher à nous cacher.

Une façon de percer ces secrets est de modifier légèrement la façon de faire la technique. La modifier en dégradant la technique. Dans le mutodori, que l’on traduit généralement par capturer sans intention, si la technique est bien faite, on se retrouve à contrôler l’adversaire en effectuant une contre-pression sur son coude, ce qui l’amène à descendre au sol. Dans le kata de base, l’adversaire nous agrippe un bras à hauteur du triceps. Cette saisie vient de l’armure où on agrippait le petit bouclier protégeant l’épaule.

Revenons à notre modification. Si par exemple on amène le bras vers le l’arrière en l’éloignant du corps, l’adversaire pourra plier son bras ce qui nous obligera à faire une clé arrière. Ce n’est pas mauvais, mais ce n’est plus un mutodori. Le secret est de passer son bras le plus près possible du corps de l’agresseur ce qui le fera penché automatiquement vers l’avant et restreindra ses mouvements. Voilà pour un petit secret dévoilé. Mais pourquoi agrippait-on l’adversaire par ce sode si ce n’était que pour le piquer de son couteau ou de son wakizashi. À ce niveau, on commence à se déplacer dans les kukans (ces poches de vide dont a parlé si souvent Soke). On ne se déplace pas avec l’intention de faire une clé, on se déplace parce que c’est l’endroit naturel où se cacher pour éviter d’être transpercé par la lame. Et quand je dis nous déplacer, je devrais plutôt dire que l’on plonge dans l’espace vide qui s’offre à nous. Il n’y avait aucune intention, aucune préméditation, uniquement des procédures à faire en fonction des gestes de l’attaquant.

L’esprit du kata n’est pas de faire un mouvement robotisé, mais d’adapter ces enchainements à des situations qui peuvent différer un peu du kata robotiser. C’est l’esprit de gokui, voir ce que le kata a à nous enseigner et non uniquement copier le modèle de base.

Tous nos kihons happo possède cette double vie qui les rend si importants dans notre art martial. Si l’on ne voit qu’une seule possibilité à chaque technique, c’est que l’on n’est pas encore en mode budo.

Je ne peux vous garantir que tout ceci est la vérité, ce n’est simplement que mon point de vue.

Bernard Grégoire

Dai Shihan Bujinkan Québec

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